LE LACTOSE EST-IL UN PROBLÈME POUR TOUS ?
Dans les précédentes parties j’évoquais la problématique des perturbateurs endocriniens et des graisses des produits laitiers. Si l’on ne retient que ces critères, on pourrait dire qu’un produit laitier issu d’un élevage bio (pâturages et de fourrages) reste approprié à l’homme.
Mais est-ce que la donne change si l’on tient compte de la problématique du lactose ?
Le lactose est un sucre, un dissacharide, c’est-à- dire qu’il associe deux molécules de sucre simple : le glucose et le galactose.
Pour réaliser sa digestion et donc passer d’une molécule double à deux molécules simples, il est nécessaire que notre système digestif soit équipé d’une enzyme spécifique : une lactase.
Les détracteurs des produits laitiers affirment souvent qu’après l’âge de 3 ou 4 ans cette enzyme (qui nous permet de digérer le lait maternel) disparaît. Nous perdrions ainsi progressivement notre capacité à digérer le lait. Cette affirmation est souvent associée au fait que l’homme serait le seul mammifère sur terre à continuer de consommer du lait après l’enfance ou encore que les laitages ne font pas partie des aliments spécifiques de l’espèce humaine.
L’élevage et la consommation de lait ne serait apparue en effet que dans les 10 milles dernières années ce qui ne représente pas grand chose à l’échelle d’une évolution qui se compte en centaines de milliers d’années.
Mais cela suffit-il pour affirmer que les produits laitiers ne sont pas adaptés à notre génétique de chasseur-cueilleur ?
Tout d’abord ce n’est pas parce que nous n’avons pas consommé couramment un aliment au cours des 500000 dernières années que cet aliment est forcément nuisible pour l’organisme ? Cela voudrait dire que nous ne pourrions pas consommer d’huile d’olive puisque celle-ci n’est consommée que depuis 6000 ans.
Croire que nous ne sommes pas adaptés au lait animal est un leurre. En effet, déjà au paléolithique, c’est à dire il y a plus de vingt milles ans (1), durant la dernière période glacière nos ancêtres, lorsqu’ils capturaient ou tuaient une femelle bison ou une jument... qui allaitait ses petits, ne se gênaient pas pour boire son lait.
C’est d’ailleurs une des raisons de la création de l’élevage : avoir disponible chaque jour à porté de main un aliment très riche en nutriments.
Il faut se replacer dans le contexte de cette époque glacière. L’Europe est une zone froide et l’apport calorique se fait essentiellement à partir d’aliments animaux. Les peuples du nord ont très tôt développé l’élevage.
Le lait puis plus tard ses dérivés, sont devenus des aliments essentiels à leur survie sur une terre très pauvre en végétaux. Plus de dix milles ans après, certains d’entre nous ont conservé cette capacité à digérer le lactose, mais aussi la caséine ou le lactosérum du lait.
La moitié de la population Française aurait gardée cette capacité enzymatique. Bien sur on trouve beaucoup plus d’intolérance au lactose dans le sud de l’Europe que dans le Nord. Et même si vous ne digérez pas le lactose, cela ne veut pas dire que vous ne pouvez pas consommer de beurre ou la plupart des fromages. Ces deux aliments ne contiennent pas de lactose (moins de 2% pour les fromages).
Il existe une autre alternative, les produits laitiers fermentés. La fermentation du lait est une réaction biochimique qui fait intervenir la lactase, l’enzyme qui transforme une partie du lactose en acide lactique, d'où le goût acide des laits fermentés. Déjà prédigérés, certains laitages fermentés peuvent être consommés par les personnes intolérantes au lactose. Le yaourt est le mieux supporté du fait de la présence de Lactobacillus delbrueckii subsp. Bulgaricus.
Dans l’absolu si vous avez la chance de ne pas être trop allergique au lactose alors vous pourriez consommer du fromage d’animaux élevés sur paturage. Mes arrières grands-parents maternels qui vivaient d’un peu d’agriculture et d’élevage dans les hautes Pyrénées, ont pour beaucoup d’entre eux vécus jusqu’à des âges canoniques. Le fromage était un de leurs aliments de base. Bien sûr, il ne s’agissait pas des vaches d’élevages d’aujourd’hui, mais les produits laitiers étaientt parfaitement digérés et ne les rendaient pas malades.
Petit bémol
De nombreuses personnes aujourd’hui développent une hyperperméabilité intestinale : la muqueuse intestinale devient une vrai passoire et laisse passer des molécules indésirables susceptibles de déclencher des réactions auto-immunes. Ces personnes sont généralement intolérantes au lactose.
Dans ma position de naturopathe, pour ces sujets fragiles sur le plan digestif, le lait et peut-être même tous les produits laitiers feront l’objet d’une éviction systématique. Par contre, pour la majorité d’entre nous, même si vous ne digérez pas parfaitement le lactose, pourquoi devriez-vous vous priver d’un bon fromage bio de pâturage ou d’un beurre de qualité fourragère ?
Ces aliments n’apportent pas de lactose (sauf à l’état de trace) mais sont en revanche très riches sur le plan nutritionnel : acides gras saturés à chaines courtes et moyennes, cholestérol (une molécule indispensable), minéraux... et des acides aminés essentiels ! Encore une fois, l’individualisation s’impose.
Il nous reste donc à explorer les autres aspects des laitages. La digestibilité et les effets métaboliques de leurs protéines (caséines, lactosérum) et la problématique des facteurs de croissances très polémique à l’heure actuelle.
En attendant d’en apprendre plus sur le sujet, seul un peu de bon sens et d’auto-observation vous permettront de savoir si vous êtes fait pour consommer certains produit laitiers !
Fin de la 5ème partie
(1) Le début de l’ère paléolithique vient d’être datée à 300000 ans et s’achève après un réchauffement climatique important il y a environ 20 mille ans. C’est le début de l’ère néolithique avec l’apparition de l’agriculture et le développement de l’élevage.
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